jeudi 13 septembre 2012

officiel : georges devient charlie et continue à entraîner


Mai 68, Mai 1981, des mois de rupture, Mai 2012, il y a eu des changements dans ma vie, pas une révolution, cependant une étape mémorable.
Il faut revenir avant ma naissance, mon grand père paternel, vietnamien, s'appelle Lê Van Tram, mon papa lui Lê Hoang An. Papa se marie avec une quarteronne, c'est à dire que son grand-père paternel est Français, il s'est marié à une vietnamienne, et mon grand-père s'est marié à une vietnamienne, la maman de ma maman.
Qui suis-je ? En plus d'être octoron, un huitième français et sept-huitième vietnamien, je suis français de nationalité. Papa est devenu français à son mariage. En 1956, deux ans après Dien Bien Phu, pour les français en Indochine cela devenait très compliqué, Papa et Maman ont décidé de venir à la métropole. La francisation du nom a eu deux conséquences sur l'état civil. Lê étant trop court, papa a fait changer en Le Hoang An puis Le Hoangan, son premier prénom était André, son deuxième Georges et tous ses proches le prénommaient Georges. Pour je ne sais quelle raison, papa a décidé que ses enfants se prénommeraient tous Georges. Maman, elle, trouvait plus pratique de nous appeler chacun différemment et c'est ainsi qu'elle m'appelait Charlie. C'est vraiment très tard que j'ai appris que mon prénom officiel d'état civil était Georges environ à l'age de 11 ans.
Papa souriait toujours quand je lui racontais mes mésaventures administratives. Quand l'été 2010 au Vietnam avec quelques frères nous avons répandu ses cendres, une page a été tournée. Il m'a fallu un an pour me décider à entreprendre les démarches pour demander à changer mon état civil.

Ce 21 mai 2012, je reçois un courriel avec une copie du délibéré envoyée par le greffe du tribunal.
C'est officiel, Charlie est mon premier prénom et cela va être inscrit au registre d'état civil à Châteauroux, là où je suis né un jour de passage de Charles De Gaulle il y a 53 ans.

Il y a la vie qui s'écoule, il y a possibilité de s'installer dans le confort et il y a des parcours chaotiques, il y a des aventures, des voyages inattendus, des prises de risque. Il y a chez moi toujours l'envie de progresser, de construire, de parfaire. En ce mois de Mai il y a eu une nouvelle façon d'envisager le futur. Cette période de grande réflexion me met dans l'inconfort, juste l'opposé de la routine qui pouvait s'installer.
Les éléments fondamentaux sont d'abord ma famille, avec Babeth mon épouse, nous sommes toujours attentifs et vigilants sur le cheminement, la construction, l'éducation de nos enfants mais ils sont grands maintenant ou tout du moins les trois premiers, Camille 26 ans interne en médecine générale, Julien 24 ans menuisier ex compagnon du devoir et maintenant apprenti philosophe, Pierre 21 ans élève ingénieur, il reste Marie 16 ans lycéenne.
Après ma famille, il y a celle de papa et maman, on ne choisit pas ses parents, on ne choisit pas ses frères et soeurs, ils sont là, ils sont dans nos pensées et s'ils nous appellent nous sommes prêts à les aider s'ils en ont besoin.
Il y a mes amis, ceux que j'ai choisis et vice-versa. En ce mois de Mai, j'ai encore eu l'occasion de savourer pleinement des moments simples de bonheur avec ceux qui partagent quelques kilomètres de course et qui sourient, rigolent franchement autour d'un repas.
Je ne connais pas la solitude du coureur de fond, je suis un outre-coureur, je partage avec des infra-joggeurs et au delà de mes passions sportives il y a ma quête de progression dans la vie, la vie tout court pas un assemblage de ma vie familiale avec ma vie professionnelle avec ma vie de sportif avec ma vie de « professeur ».

A partir de maintenant je vois les choses autour de moi sous un autre éclairage. Quand j'ai rencontré des personnages qui n'étaient pas sincères avec les autres, qui se mentaient à eux mêmes, qui jouaient à une comédie et qui cherchaient sans cesse la scène et les projecteurs, j'ai eu un rejet qui s'est installé et a grandi, cela approchait même la nausée. Depuis, il m'importe surtout d'agir dans ce qui m'apparaît aller dans le sens de l'amélioration de chacun et de tous, il ne s'agit pas de me fondre et disparaître comme individu mais plutôt en associant mes forces, mon énergie à mes frères et amis avoir plus d'impact. Un philosophe qui vit en ermite n'arrivera qu'à se convaincre lui-même du bien-fondé de sa philosophie et son groupe sera réduit à une personne, l'humanité entière continuera son chemin sans apport de la méditation de ce philosophe.
Quand j'entraîne des athlètes, j'ai un groupe assez important avec quelques dizaines de membres, quand des athlètes que j'entraîne deviennent à leur tour entraîneur, mon groupe additionné aux groupes de mes athlètes-entraîneurs est beaucoup plus grand. Quand ma sagesse est partagée, je reçois et je donne, le “Je” deviens nous; nous contribuons chacun à notre progression personnelle et collective.